Véronique Olmi

Le courage des innocents (2024)

 

Un jeune homme, à la recherche de son frère malmené par un père alcoolique, se retrouve sur un coup de tête en Ukraine, confronté à la déshumanisation par la violence et le mensonge… Magnifique roman, qui n’a rien d’une fiction, mais tout d’un témoignage ou d’un reportage. Avec cette imagination qui n’a d’irréel que le nom des personnages dans un contexte choisi, V. Olmi nous livre un reportage inouï, d’un réalisme de journaliste caméra au poing, sur les drames familiaux vécus en France et finalement causés par les bombes russes larguées dans le ciel ukrainien. Dans cet enchevêtrement de cris, de bagarres et de souffrances les enfants sont conçus dans le plaisir mais élevés dans la souffrance d’adultes devenus dangereux. Quel avenir quand l’esprit est formé au mensonge ou à la guerre, que l’avenir ne cristallise plus d’espoir et que le mental est broyé ?

 

 

Patrice Gain

 Les brouillards noirs (2024)

 

 Un violoncelliste de renom apprend la disparition de sa fille dont il ignore qu’elle se trouve aux iles Feroé, très impliquée dans la défense des mammifères marins que l’usage permet ici, de décimer. Ce musicien mène une enquête quasi policière, confondue rapidement pour le lecteur, à cette chasse difficilement soutenable et combattue avec virulence à notre époque. Ce n’est pas un livre majeur dans la littérature actuelle, mais c’est une source très instructive de renseignements sur les massacres de baleines perpétrés sur la planète, et combattus par des associations comme celle de Sea Shepherd. La lecture est rapide et le livre rondement mené, tel un roman policier assez haletant et rempli d’imprévus. 

 

Nicolas Bouvier

L'usage du monde (1963)

   

 J’ai eu beaucoup de mal à poursuivre la lecture de cet ouvrage au-delà d’une cinquantaine de pages : sans doute n’avais-je pas suffisamment et à ce moment précis, l’esprit d’une aventurière pour entreprendre cet extraordinaire voyage ! Et puis, les yeux et le mental plus ouverts et grâce à d’autres lecteurs, je me suis fondue dans cette épopée digne de celle d’Ulysse en d’autres temps…  Le lecteur ne manque aucun détail des avaries d’une voiture pourrie sur des pistes de dromadaires, pas plus que les propos tenus sur la générosité des peuples rencontrés. La Bulgarie, la Turquie, l’Iran, l’Afghanistan… ces populations que nous connaissons peu, et ne pourrions plus rencontrer dans ces conditions, nous sont présentées ici dans tout leur folklore, leur hospitalité, leur gentillesse et leur accueil. Cette traversée du Moyen-Orient a dû susciter de nombreuses envies, au nombre desquelles la rencontre avec des gens qui n’ont rien de commun avec nous et nous ressemblent pourtant en tout point ! C’est le second miracle de la vie sur notre planète et ce livre nous en fait heureusement prendre conscience. Un profond respect de l’autre, nous invite à la tolérance, l’acceptation et le partage. Qu’aurions-nous de meilleur à offrir ? Par ailleurs, les textes sont bien écrits, souvent avec humour et beaucoup d’élégance. Les illustrations en revanche, ne m’ont pas subjuguée… mais justement c’est le texte qui m’intéressait : il m’a profondément touchée.

 

Peter May

Tempête sur Kinlochleven  (2024)

 

 Un policier, veuf et séparé de sa fille, accepte de partir couvrir une enquête concernant le meurtre d’un journaliste dans le centre de l’Ecosse. Il sait que sa fille est sur le site, qu’elle a découvert le corps, mais se sachant lui-même perdu, il met toutes les chances de son côté pour renouer ce lien. Le dialogue père-fille rompu depuis toujours, se reconstruit dans la douleur et l’incompréhension mais finira par évoluer. Dans ce roman policier de science fiction, qui se déroule dans les années 2050, P. May a su mettre en relief ce que possède d’humanité chaque individu dans un face à face rendu cruel par la rancoeur d'un enfant et l'immense amour d'un parent. Entre le courage du père, son mental et leur cheminement à tous deux, les mots de ce roman sont durs parfois mais à mon sens, le récit est très réussi grâce à la diversité et au rythme du déroulement de l’action.

 

Yasmina Khadra

 

Cœur d’amande -  (2024)

 

 Dans les bas-fonds de Barbès, un jeune homme pourrait s’identifier aux racailles qu’il côtoie ou bien s’en inspirer dans la vie qu’il mène. Contrairement à ces profils si courants, il se révèle être attachant, généreux et même assez désarmant vis-à-vis de sa grand-mère. L’auteur nous abreuve ici d’un très joli récit, qui ne comporte aucun évènement majeur ni même d’action importante ; c’est un livre de sentiment, d’humanité, de partage et d’amour. Il est plein de douceur et de poésie ; la plume de Yasmina Khadra est toujours choisie, réfléchie, percutante et si jolie à l’oreille… Le lecteur n’en a pas l’habitude, mais il lui offre là un ouvrage rempli de l’oxygène de vie.